Fallen Astronaut, de l'artiste Paul Van Hoeydonck, sur le Mons Hadley, sur la Lune. |
Le jeune Ukrainien de 24 ans faisait partie d'un groupe de vingt pilotes militaires soviétiques sélectionnés dans le cadre du programme Vostok. Ce programme, mis sur pied par l'URSS en 1959, visait à envoyer des êtres humains dans l'espace. Plus précisément, le but était de placer un homme en orbite autour de la Terre, et surtout, évidemment, d'arriver à le faire avant que les États-Unis n'y soient parvenu.
Tandis que le programme Mercury de la NASA misait sur un groupe de sept pilotes expérimentés, le fondateur du programme spatial soviétique, Sergueï Korolev, avait choisi de ne recruter que de jeunes pilotes afin d'en faire des cosmonautes de carrière. Le manque d'expérience était compensé par une plus grande automatisation du pilotage de la capsule Vostok. Korolev décida également de choisir trois fois plus de candidats que la NASA. La suite des événements devait lui donner raison, puisque des vingt pilotes qui commencèrent l'entraînement, seuls douze d'entre eux le complétèrent. Parmi ceux-ci, on compte les pilotes des capsules Vostok 1 à 5, lancées en 1961, dont Yuri Gagarine, le tout premier homme à avoir volé dans l'espace.
Vous aurez déduit que Valentin Bondarenko faisait partie des huit aspirants cosmonautes qui n'ont pas pu se rendre au bout du programme Vostok. À la fin de l'exercice du 23 mars 1961, pendant que l'eau destinée à son thé chauffait sur une plaque électrique, il décolla les électrodes qui avaient recueilli ses signes vitaux durant son entraînement dans la cabine pressurisée. À l'aide d'un tampon imbibé d'alcool, il nettoya le résidu de colle laissé par les électrodes sur son corps, puis il jeta nonchalamment le tampon, qui tomba sur la plaque chauffante.
L'air de la cabine pressurisée était constitué à 50% d'oxygène. Dans cet environnement propice à la combustion, l'alcool du tampon prit feu au contact de la source de chaleur, et rapidement, c'est l'habitacle entier, cosmonaute inclus, qui se retrouva la proie des flammes. Le temps de dépressuriser la cabine, une trentaine de minutes se sont écoulées avant qu'on puisse enfin extraire le pauvre pilote de cet enfer.
Selon le témoignage du docteur Vladimir Golyakhovsky, qui était le chirurgien de garde à l'hôpital Botkin quand on y amena Valentin Bondarenko, le patient n'avait plus de cheveux, plus de peau, plus d'yeux, et le seul endroit où les médecins purent trouver des vaisseaux sanguins relativement intacts pour lui administrer des antidouleurs fut la plante de ses pieds, qui avait été protégée par ses bottes. Pourtant, le cosmonaute était non seulement vivant, mais toujours conscient. Et il implorait ses médecins de faire quelque chose pour le soulager de sa douleur.
Il mourut à l'hôpital, plusieurs heures plus tard. L'officier qui était resté auprès de lui était nul autre que Yuri Gagarine, trois semaines avant son vol historique.
Guerre froide oblige, la mort de Valentin Bondarenko ne fut rendue publique qu'en 1986 par les autorités soviétiques. Certains auteurs avancent qu'il n'aurait été qu'un exemple parmi de nombreux citoyens soviétiques morts durant les balbutiements de l'exploration de l'espace. D'innombrables cas de présumés incidents au sol et de cosmonautes perdus à tout jamais dans l'espace s'accumulent, mais l'opacité du programme spatial soviétique — puis russe — rend toute forme de bilan très difficile à produire.
Toujours est-il que les noms de Bondarenko et de Grigori Nelioubov, l'autre cosmonaute de cette époque dont la mort a été dévoilée durant les années 1980, ne se trouvent pas sur la plaque commémorative installée sur la Lune en 1971 par l'équipage de la mission Apollo 15. Cette plaque accompagne Fallen Astronaut, l'unique oeuvre d'art qu'on retrouve sur la surface de la Lune, et dresse la liste des quatorze astronautes et cosmonautes du début de l'ère spatiale dont le décès avait été rendu publique.
Sources : James Oberg, Encyclopedia Astronautica, Spacefacts, et bien sûr divers articles de Wikipédia dans plusieurs langues.
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