C'est à l'étage de la maison du milieu, la deuxième à partir du coin de la rue Murray, que se déroula ce qui suit. (Photo : Canadian illustrated news) |
Le 26 ou le 27 juin 1879 (selon les sources), Helen Troy, une veuve habitant là où se trouvait à l'époque le 242, rue William, près de l'intersection de la rue Murray, perçut le bruit d'une lourde chute provenant de l'étage supérieur, suivi d'un son s'apparentant à celui que produit une personne en bûchant du bois. Ces quelques sons suivaient une violente dispute comme elle en entendait régulièrement en provenance de chez les voisins du haut, de grands buveurs...
Quelques heures plus tard, on découvrit la scène suivante à l'étage : le corps à peu près nu de Mary Gallagher — identifiée à tort comme étant Kate Conway au départ —, 60 ans, étendue sur le sol de la cuisine, la tête et une main en moins, ces deux morceaux reposant dans une bassine à proximité, le visage et le crâne défoncés; puis le corps inerte de Susan Kennedy, 30 ans, la résidente des lieux, profondément endormie dans son lit, probablement assommée par l'alcool, vêtue de ses propre vêtement et de ceux qui auraient visiblement dû se trouver sur la victime, recouverts de sang.
C'est ici que ça se complique. Les deux femmes étaient connues pour leurs beuveries et des rumeurs circulaient quant à la venue fréquente de «visiteurs» dans cet appartement de Griffintown, qui était à l'époque un quartier ouvrier très actif (et très pauvre) du sud-ouest de Montréal. Certaines sources affirment qu'elles s'adonnaient à la prostitution, et qu'une histoire de jalousie pourrait être à l'origine de la tragédie.
D'ailleurs, certains témoins racontèrent avoir aperçu un certain Michael Flanagan entrer sur les lieux avec la défunte ce matin-là. Impossible, cependant, de déterminer s'il s'y trouvait toujours au moment du meurtre, d'autant plus que Susan Kennedy, tout à fait incohérente, changea sa version des faits à plusieurs reprises. Elle fit allusion à un certain capitaine de navire, qui se serait également trouvé dans l'appartement à un point dans cette histoire, et qui, selon elle, aurait lui seul été coupable du sordide méfait. Justement, le présumé premier témoin de la scène finale, qui ne fut pas entendu en cour en raison de son jeune âge, affirma que deux hommes se trouvaient sur place lorsqu'il monta voir ce qui s'était passé : l'un dormait dans le lit de madame Kennedy, et l'autre aurait été endormi sur la table.
Autres éléments de preuve : Susan Kennedy aurait été entendue, dans les heures précédent le crime, menaçant précisément, en hurlant, de s'en prendre à Mary Gallagher avec une hache. On trouva effectivement une hachette recouverte de sang et de cheveux dans un coffre, dans l'appartement. Le coroner affirma en outre que l'attaque avait été aussi brutale que maladroite, ce qui correspond à l'hypothèse d'un agresseur lourdement intoxiqué par l'alcool. On aurait aussi entendu la suspecte hurler, peu de temps après, qu'elle avait finalement obtenu la vengeance qu'elle attendait depuis longtemps.
Finalement, Kennedy fut condamnée à être pendue jusqu'à ce que mort s'ensuive, son exécution devant avoir lieu le 5 décembre suivant. Sa peine fut commuée en une peine de prison, et bizarrement, c'est plutôt Michael Flanagan, pourtant acquitté, qui eut un accident mortel précisément ce jour-là.
Quant à Mary Gallagher, elle fut jetée sans cérémonie dans une fosse commune du cimetière Notre-Dame-des-Neiges. Depuis, on raconte qu'elle revient chaque sept ans, au coin de William et de Murray, à la recherche de sa tête. C'est donc dire que nous recommandons vivement d'ouvrir l'œil si vous avez à faire un tour dans Griffintown ces jours-ci. Le quartier fut abandonné, puis oublié depuis longtemps, mais son récent regain de vie pourrait apporter une motivation nouvelle au fantôme de Mary Gallagher, qui doit revenir cette année pour la dix-neuvième fois depuis sa mort violente.
Souhaitons-lui de retrouver sa tête en 2012 pour enfin pouvoir reposer en paix.
L'archéologue Urbain
(très détaillé, avec transcription des articles publiés à l'époque)
Patrimoine, Histoire et multimédia
(autre source détaillée, avec quelques infos divergentes)
Fort intéressant. Intriguant, l'histoire de cet homme qui a un accident mortel la journée où aurait dû être exécutée Kennedy.
RépondreSupprimerSinon, Griffintown, c'est le titre d'un roman écrit par une magnifique auteure québécoise, bouquin dont je lisais le synopsis pas plus tard qu'hier. Je te recommande...