samedi 25 février 2012

Robert Devereux, comte d'Essex (1565–1601)

La tête du comte d'Essex, lorsqu'elle était toujours en place.
Robert Devereux a été de le deuxième comte d'Essex, et se faisait donc appeler Essex, pratique que nous emploierons ici. Pour vous situer, son arrière-grand-mère maternelle (Mary Boleyn) était la sœur de la mère (Anne Boleyn) de la reine Elizabeth I.

Il fut par ailleurs la dernière personne décapitée dans la Tour de Londres. Voici son histoire.


Dès son arrivée à la cour au début de la vingtaine, le comte plut à la reine, qui en fit son Maître de la cavalerie, un rôle d'une grande importance et d'une grande noblesse à l'époque. 
Derrière son éloquence et sa suavité, qui avaient charmé la reine Elizabeth, se cachait toutefois une tête dure impénitente. Essex défia régulièrement les ordres de la reine, se croyant probablement intouchable puisqu'il lui plaisait tant. Ainsi, lors de diverses missions, il ignora certains ordres reçus, ce qui eut pour effet d'irriter une bonne partie de la cour, à commencer par le secrétaire principal de sa majesté, Robert Cecil, qui devint son principal adversaire.

Le pire affront survint lors de ce qui s'avéra la dernière grande mission du deuxième comte d'Essex. Il s'était faufilé, en convainquant judicieusement certaines personnes, jusqu'au poste de Lord lieutenant d'Irlande, ce qui correspondait ni plus ni moins au représentant de la couronne et donc au chef du pouvoir exécutif. Au milieu de la Guerre de neuf ans en Irlande, aucun commandant anglais n'avait réussi à obtenir de victoire significative, et le comte fut envoyé au front avec 16 000 hommes. Sa mission était claire : mettre un terme à la rébellion irlandaise. De l'avis général, les chances de succès d'un déploiement d'une telle ampleur s'annonçaient grandes.


Ça ne se produisit pas exactement ainsi. Au lieu de se diriger vers l'Ulster pour aller y affronter le chef des rebelles, comme prévu, le comte se dirigea plutôt vers le sud, où son armée fut dispersée en plusieurs garnisons et où il gaspilla ses fonds limités tout en multipliant les affrontements plus ou moins convaincants. Affaibli, il cumula les défaites aux mains des rebelles et dut négocier une trêve avec leur chef.


Pendant que cette démonstration humiliante pour la couronne se déroulait, Essex parvenait toujours à conserver la loyauté de ses plus valeureux soldats en les nommant Chevaliers...


Un matin, avant même d'être adéquatement vêtue et coiffée, Elizabeth eut la surprise de voir débarquer le comte d'Essex dans sa chambre, alors qu'elle lui avait formellement interdit de revenir avant d'avoir terminé sa mission. Pour l'ensemble du bourbier causé par ses nombreuses désobéissances, on lui ordonna de comparaître devant le Conseil privé, où il fut interrogé durant cinq heures au sujet de son travail en Irlande, avant d'être assigné à résidence.


Les mois suivants, les avis divergèrent quant à son sort. Robert Cecil exerçait toute la pression qu'il possédait pour que cet homme qu'il détestait perde toute forme de pouvoir, alors que d'autres, dont la reine, commençaient à voir la trêve comme une idée pas si bête, finalement. D'autres encore suggéraient même de le renvoyer en Irlande poursuivre sa mission.


Le 5 juin 1600, Essex fut ramené à genoux devant une commission qui lui rendit ce verdict : son retour d'Irlande correspondait à une désertion, et il était désormais dépouillé de tout pouvoir et écarté de la cour. Bref, ils le renvoyèrent définitivement à la maison.


Le 8 février 1601, regroupant les hommes qui lui étaient restés fidèles, il se rendit à Londres afin de tenter de forcer une audience avec la reine. Ça ne fonctionna pas et Robert Cecil le fit immédiatement déclarer traître à la couronne. Peu de temps après, le comte était arrêté chez lui. Son procès ne prit guère plus que quelques heures de la journée du 19 février, et une semaine plus tard, le 25 février, le bourreau Thomas Derrick dut s'y prendre à trois coups de hache pour venir à bout de lui trancher la tête.


Une curiosité mérite d'être soulignée. Il était difficile de recruter les bourreaux à l'époque, et comme plusieurs d'entre eux, Derrick avait choisi ce métier en échange du pardon d'un viol duquel il avait été reconnu coupable. Vous serez intéressés d'apprendre que l'âme charitable qui lui avait permis cette amnistie était nulle autre que le compte d'Essex.

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire